ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE

Joséphine       Goube

Parce que nous pourrions tous être réfugiés un jour

Interview et article
Valentin Pringuay

Photo
Constance Viot / SMILLZ
Arnaud Roiné

TERRA INCOGNITA #01 EN QUÊTE DE SENS

Le vendredi 29 septembre 2017, Joséphine Goube, CEO de Techfugees, nous a donné rendez-vous en plein coeur du deuxième arrondissement de Paris.

Arrivés en repérage à 9h pour un shooting à 9h30, nous dépassons de 10 minutes l’horaire prévu avant de nous inquiéter de ne pas la voir arriver. Elle se confond immédiatement en excuses par SMS : son avion a eu du retard et elle ne pourra pas être là avant une heure. Je me tourne alors vers Arnaud Roiné, le photographe qui nous accompagnait ce jour-là. Il n’a pas de rendez-vous dans l’immédiat, mais s’inquiète pour une tout autre raison : ne risque-t-elle pas d’être complètement éreintée après les huit heures de vol depuis Toronto ? Je plaisante alors sur le fait que Joséphine pourrait bien être capable d’avoir plus d’énergie que nous, tant j’avais été marqué par la vitalité de cette jeune femme de 29 ans.

En effet, lorsque nous avions réalisé son interview dix jours plus tôt, elle riait souvent, haussait le ton, frappait du poing dans le creux de sa main, nous faisait revivre une conversation en imitant les voix des différents protagonistes. Elle m’avait marqué par la maturité d’un discours en opposition avec les éclats d’une personnalité beaucoup plus jeune. Et cela n’a pas manqué, quand Joséphine déboule sur la terrasse du café où nous l’attendons, elle déborde d’une énergie inépuisable. Elle s’assoit rapidement sur une chaise avec nous et s’exclame la seconde suivante que son voyage était génial, que la projection du documentaire de l’artiste Ai Weiwei était dingue, qu’elle a pu rencontrer la première dame du Canada et qu’elle a bon espoir de la faire venir à l’événement Techfugees le mois suivant. Elle rayonne et enchaîne les phrases sans prendre le temps de respirer. Je regarde Arnaud et on se comprend sans un mot : elle est dans de bonnes conditions pour faire les photos.

 

Le syndrome de l’imposteur

 

Joséphine vient d’une petite ville dans le Nord, appelée Neufchâtel-Hardelot, à proximité de Boulogne-sur-Mer. « J’ai vécu là-bas jusqu’à mes 18 ans, et je me suis bien emmerdée » dit-elle d’une voix enfantine. « Il n’y avait pas grand monde et pas grand-chose à faire. J’avais soif de découvertes. J’ai heureusement un papa très ouvert sur le monde qui me ramenait Courrier International, Le Monde et plein de bouquins, et une maman qui a toujours voulu que je travaille et que je sois indépendante. »

Si Joséphine ne souffre pas à proprement parler du syndrome de l’imposteur, le fait d’habiter une petite ville l’amène à penser qu’elle ne réussira pas. Jusqu’à ce jour où, à 18 ans, elle candidate à Sciences Po sans prévenir ses parents et sans vraiment y croire. Elle ne prend d’ailleurs même pas le temps de vérifier les résultats. C’est sa mère qui lui apprend des semaines plus tard qu’elle est reçue, et là encore, elle croit d’abord à une blague. « Je le décris toujours comme une histoire hyper marquante, parce que ça a vraiment déclenché quelque chose dans ma tête. Cela voulait dire que c’était possible : quelque chose qui me paraissait totalement impossible était possible. »

À partir de ce moment-là, elle fait Sciences Po, parce que c’est possible. Elle réalise son stage de troisième année à New York, parce que c’est possible (ni elle ni ses parents n’ont pourtant de contacts là-bas). Elle postule ensuite à la London School of Economics, parce que c’est possible. Elle monte un incubateur, avant même de commencer les cours à la London School of Economics, parce que c’est possible… et ainsi de suite. « Depuis toujours, je suis butée quand j’ai une idée, même si tout le monde me dit que ça ne va pas être possible. » Joséphine s’arrête un bref instant avant de reprendre en riant : « Et surtout quand on me dit que ça ne va pas être possible .»

 

 

 

Les réfugiés en fil rouge

 

Comment la jeune femme en est-elle arrivée à s’intéresser à la problématique des réfugiés ? Joséphine pourrait retracer a posteriori les raisons qui l’ont amenée à travailler avec des réfugiés : « Je peux faire une jolie histoire qui passe bien dans les magazines », explique-t-elle en souriant. Mais la vérité n’est pas aussi évidente : elle en est arrivée là grâce à une série d’événements qui n’ont pris sens que bien plus tard.

Tout a commencé à New York où, après avoir mis en place des communications sur le diabète auprès des migrants, elle se retrouve sans job pendant le dernier mois de son visa. Elle se met donc en tête d’explorer la ville avec un petit calepin à la main. Ses journées, elle les passe à échanger avec des Russes de Coney Island, des Portoricains de l’East Village, des Africains-américains et Caribéens d’Harlem, des Grecs d’Astoria et des Juifs de Brooklyn. Joséphine allait à leur rencontre avec la seule volonté de comprendre pourquoi ils se sentaient new-yorkais. Elle n’avait aucun but précis avec ce petit questionnaire, si ce n’est que la réponse l’intéressait à titre personnel. Sa fascination pour le dynamisme entrepreneurial de New York l’a poussée à monter un incubateur pour les entrepreneurs tech et sociaux dès son retour en Europe. C’est à cette période qu’elle a rencontré un entrepreneur qui lui fait ouvrir les yeux sur le champ des possibles de l’aide aux réfugiés. Cet entrepreneur travaille avec des migrants en Italie depuis une dizaine d’années et explique à Joséphine le monde d’opportunités qui s’ouvre à eux à une époque où la plupart des réfugiés auraient bientôt des téléphones portables dans leur poche. La jeune femme avait déjà pris conscience de la puissance des réseaux sociaux comme moyen d’aider les migrants : « Je me disais, ça va vite et dans une direction qui va aider les minorités, qui leur apporte de nouveaux moyens d’expression. Et là je me dis : “oh putain, oh putain !,” La connexion se fait dans ma tête. » Elle fait alors une nuit blanche pour réaliser des recherches sur le nombre de migrants, leurs origines, les problèmes auxquels ils font face, etc.

Dès le lendemain, ils poseront les premières pierres de ce qui allait devenir Migreat (alors appelé Sharehoods), un réseau social pour migrants, avec de premiers services et informations. Ils mesurent très vite que le contenu le plus populaire concerne les visas. Joséphine creuse pour en comprendre les raisons. Elle découvre alors les textes légaux, les problèmes juridiques, les complexités administratives qui se dressent devant des populations déracinées qui peinent à naviguer dans un nouveau pays. Migreat conçoit alors une intelligence artificielle qui offre un accompagnement personnalisé en fonction du type de visa dont la personne a besoin. Le service est lancé en 2012 avec les informations relatives à 5 pays européens. Dès 2014-2015, ce sont plus de 2 millions de visiteurs qui viennent s’informer sur Migreat. L’aventure se termine pourtant mal pour l’entreprise et celle qui allait devenir la CEO de Techfugees en conserve quelques cicatrices.

Fin 2016, un désaccord émerge avec les investisseurs qui veulent insuffler au projet une dimension beaucoup plus commerciale. Joséphine concède ne pas avoir réussi à se montrer diplomate et avoir préféré « lâcher l’affaire ». C’est pourtant pendant la période Migreat que la jeune femme se passionne pour la data. Elle scrute constamment les données publiques des gouvernements pour voir, qui traverse les frontières, qui ne passe pas, sous quels critères… Elle est alors profondément choquée par la différence entre les données et le discours journalistique : les faits sont souvent à l’opposé de ce qu’on retrouve dans les articles de presse. « Les gens ont peur des migrants qui chopent les boulots… Eh bien si on regarde les données, ils ne les choppent pas les boulots des gens locaux », assène Joséphine avec force. Elle se met alors à écrire sur les vrais facts de l’immigration : sur ces migrants qui ne viennent pas chercher le système d’assistanat, ces réfugiés qui sont plus entrepreneurs que les locaux, sur le visa entrepreneur que tous les gouvernements promeuvent, mais qui ne fonctionne pas, etc. Elle se met à appeler régulièrement le quotidien britannique The Guardian pour leur annoncer : « J’ai un scoop, j’ai trouvé des data ! » À force de pugnacité, la jeune femme arrive à attirer l’attention, jusqu’à retenir celle de la Commission européenne qui lui propose de venir aider à réformer la carte bleue européenne (l’équivalent de la green card américaine). Joséphine n’hésite pas une seule seconde et accepte l’invitation, même si elle a d’emblée l’impression de ne pas être à sa place : « J’étais la plus jeune, je n’étais pas du tout habituée à leur format… et je n’avais pas envie de me prêter au format. » Là encore, entre manque de diplomatie et rébellion, elle se fait remarquer, se montre très émotionnelle, pose les questions qui fâchent. Mais à nouveau, cela fonctionne pour Joséphine qui arrive à faire passer certaines de ses idées.

 

 

L’aventure Techfugees

 

Vous vous rappelez sans doute la photo d’Aylan, enfant syrien de 3 ans, retrouvé mort sur une plage turque. Difficile d’oublier l’image de ce petit corps sans vie, face contre terre, dans son t-shirt rouge et son short bleu. L’image hantera certainement Mike Butcher jusqu’à la fin de sa vie. Mike dirige la section européenne du très réputé magazine américain TechCrunch. Il est évidemment ému face à cette photographie et réagit en s’exclamant publiquement : « Mais que fait le monde de la tech ? »

À une époque où autant de cerveaux sont mobilisés pour maximiser le taux de clic sur des publicités, pourquoi personne n’a décidé de s’attaquer à ce genre de problématiques bien plus cruciales ? Il crée alors un groupe Facebook qu’il appelle Techfugees, et lance cet appel : « qui veut m’aider à monter un événement dans dix jours pour parler de ce que la tech peut faire pour aider les réfugiés ? » Joséphine contacte Mike dans la foulée pour lui proposer son aide. Sa première suggestion : amener des réfugiés dans le groupe Facebook pour qu’ils puissent partager leurs problématiques en direct. Mike est à la recherche de toutes les bonnes volontés et accueille Joséphine les bras ouverts. À ce moment-là, l’ambition du projet reste très limitée : l’idée était avant tout de lancer une conversation sur le sujet, de rassembler du monde le temps d’un événement, « et ce sera tout », imaginaient-ils.

Dix jours plus tard, ce sont 300 personnes qui se déplacent pour échanger sur cette crise des réfugiés. Joséphine nous raconte l’émotion qui flottait dans la salle, le sentiment qu’il était concrètement possible de faire quelque chose pour sauver des vies et améliorer le quotidien de millions d’autres. Dès le lendemain, la toute récente équipe de Techfugees enchaîne avec l’organisation d’un hackathon qui donne naissance à des projets qui existent encore aujourd’hui (pour 70% d’entre eux) et ont un fort impact sur le terrain. Techfugees se retrouve alors à gérer des appels entrants du monde entier pour répliquer l’événement sur les cinq continents. Le projet prend alors de l’ampleur à ce moment : les événements se multiplient et l’équipe commence à structurer son approche. D’un simple appel sur Facebook, Mike Butcher a démarré une entreprise sociale et propulse Joséphine Goube à sa tête. Il faut dire que, à 29 ans, la CEO possède la passion et la vision nécessaire pour faire grandir Techfugees. Elle organise donc une initiative décentralisée, structurée en chapitres, avec des personnes sur place qui sourcent les problèmes des ONG locales ainsi que les problèmes des réfugiés locaux. Le modèle choisi est celui du hackathon puisque c’est la manière la plus simple et agile de rassembler des gens et d’obtenir de l’argent des partenaires. Elle souhaite véritablement créer une communauté d’échange et de bonnes pratiques. « L’ambition que j’ai pour Techfugees, c’est une organisation qui rende de la visibilité à cet écosystème, qui garde l’intelligence de cette communauté en ligne pour être accessible à tous. Parce que d’ici 2 ans, le Bangladesh risque d’avoir des inondations, il y aura des réfugiés et tout ce qui a été pratiqué en Europe pourra servir là-bas, c’est vraiment important que ce ne soit pas perdu. » Joséphine se montre en effet très réaliste quand elle poursuit : « Nous ne sommes pas la première organisation à faire de la tech pour les réfugiés, et nous ne serons pas la dernière. Mais je veux être sure que, même si on meurt, le travail de Techfugees pourra contribuer à un travail plus général, poursuivi par l’ONU ou par d’autres. Nous voulons créer un marché, un écosystème viable, avec ses modèles économiques. Je suis persuadée – je n’ai pas le moindre doute – que ce marché arrive. La question c’est : à quelle vitesse ? Je veux que Techfugees soit le premier à accélérer l’arrivée de ce marché et donner des structures pour l’organiser. »

La bonne nouvelle pour Joséphine, ce sont les dernières actualités qui continuent de lui donner de nouveaux arguments ou supporters. « Merci Trump ! », s’exclame-t-elle. « Trump nous donne une plateforme énorme. Les entreprises aux USA doivent répondre à la menace Trump. Tous les employés se demandent ce que fait leur boîte pour se mobiliser contre les agissements de Trump et les budgets RSE sont de plus en plus importants pour faire des “statements” [prises de position] politiques. »

 

Techfugees Summit : 2 ans plus tard

 

Les 25 et 26 octobre, Techfugees a organisé un grand Summit à Station F, l’occasion de faire le point après deux années d’existence. « On ne fait pas un projet d’entreprise sociale en 3 ans », lance Joséphine. « C’est du 5-7 ans facile. Cet événement va nous permettre de donner de la visibilité à des projets en disant : ça va prendre du temps, mais ça se construit petit à petit. » Lorsqu’elle parle de la nécessité de construire une entreprise sociale en 5 à 7 ans, cela tranche avec l’impatience qui transpire de la jeune femme. Elle prend pourtant son mal en patience face à l’immense enjeu de son travail.

Les derniers chiffres font état de 21 millions de réfugiés dans le monde. Mais Techfugees utilise de moins en moins le terme réfugiés pour parler de personnes déplacées (d’où la devise de l’entreprise : « Empower the displaced with technology »). D’après Joséphine, les personnes déplacées représentent 65 millions de personnes aujourd’hui, ce qui inclut évidemment les réfugiés, mais aussi les apatrides (individus dépourvus de nationalité) et les personnes obligées de quitter leur habitation à cause d’un changement climatique, de menaces de mort, etc. « Le terme déplacé semblait plus approprié », explique-t-elle. « Et ils vont être de plus en plus nombreux dans ce cas. » Elle mentionne alors la récente évacuation de la Floride à cause de l’ouragan Irma et ces nouveaux « déplacés » américains. Si elle ne se réjouit évidemment pas de cette catastrophe, elle se félicite d’une chose : cela permet de faire comprendre que « lorsque l’on crée des technologies pour les réfugiés, on ne va pas les créer que pour des gens pauvres ou des pays en guerre, mais cela va s’adapter à de nombreuses problématiques. »

Le discours de Techfugees résonne de plus en plus largement et permet à l’entreprise d’étendre son champ d’action. De l’aveu même de Joséphine, les hackathons ne sont que la partie émergée de l’iceberg : « c’est simplement pour nous le moyen de créer ces espaces éphémères pour rassembler les gens… parce qu’il n’y a pas de dialogue sinon. » Techfugees accompagne ainsi de grandes entreprises qui souhaitent s’engager auprès des réfugiés et déplacés. Si cela peut passer par des donations ou l’utilisation d’une partie de leur budget RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises), Joséphine recherche des entreprises prêtes à faire travailler leurs ingénieurs en pro bono sur des projets issus des différents hackathons. Difficile de ne pas se laisser embarquer par l’enthousiasme communicatif de Joséphine Goube quand elle explique jusqu’où elle veut emmener le modèle. Elle va finalement nous avouer que, si l’équipe centrale de Techfugees est composée de 10 personnes, elle est aujourd’hui la seule employée. Si les enjeux semblent cruciaux, il est encore difficile de convaincre de nombreux décideurs qui refusent de s’engager sur un sujet aussi sensible. Mais bien loin de se démonter, la jeune femme préfère passer sous silence ces personnes pour concentrer son discours sur ceux qui ont eu le courage de s’engager auprès d’eux comme Schibsted ou encore Expedia.

 

Quand la tech s’attaque à des enjeux politiques

 

Si Joséphine semble engagée corps et âme dans le combat de Techfugees, elle ne se leurre pas sur les limites d’une approche 100% technologique. « Il y a des gens dans la Silicon Valley qui pensent que la tech va résoudre tous les problèmes », s’exclame-t-elle. « Mais au final, le problème est politique à la racine. Vous allez pouvoir régler des problèmes sur le contour, mais la problématique va refaire surface puisque ses racines sont encore là. » Joséphine n’accepte pourtant qu’à contrecoeur d’avouer que son engagement est politique. Comme pour se faire pardonner d’avoir utilisé ce gros mot, elle ajoute immédiatement que son engagement n’est, ni de droite ni de gauche. Pour elle, la tech n’est qu’un moyen : « je suis très intéressée par toutes les personnes qui créent des techno pour enrayer les symptômes, mais il y a un message politique profond que j’essaie de faire passer pour que d’autres s’éveillent aussi. »

Mais quant à poursuivre son combat dans un prochain gouvernement, Joséphine arrive difficilement à se le figurer. Elle se dépeint elle-même comme étant un « électron libre ». Elle a le sentiment de pouvoir faire plus de choses dans sa situation actuelle que depuis le cabinet du ministre de l’Intérieur par exemple. Elle ajoute immédiatement qu’elle ne serait sans doute pas capable de travailler dans un environnement aussi contraint. Elle reconnaît pourtant qu’il s’agit peut-être d’une question d’âge et qu’elle pourrait modérer son discours par la suite. Elle ne semble pourtant y croire qu’à moitié. Elle parle de l’importance de pouvoir se regarder en face. Elle va finalement prononcer quelques mots qui vont parfaitement résumer le pressentiment que l’on a en l’écoutant déclamer son histoire avec passion, spontanéité, fraîcheur et humour : « Je ne peux tout simplement pas avoir un discours que je ne porte pas dans le coeur ou dans le ventre. »

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